L'efficience de son entraînement physique footballistique !
- xavierblanc
- 26 oct. 2023
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 17 mai

Pour qu’un entraînement soit performant, il doit être efficient. Dans un domaine qui se caractérise par un manque de temps d'entraînement, il s'agit de s’interroger sur la manière de réduire au maximum les coûts physiques tout en maintenant, voire en développant, la performativité des joueurs. Répondre à cette question nécessite d’identifier en premier lieu les différents coûts de l'entraînement physique footballistique, puis de discuter des moyens et des mesures permettant de les réduire.

La prise en compte de la composante physique dans le football a connu une évolution très importante au cours des trente dernières années. Cette évolution découle du constat, dès le début des années 1990, que des entraînements structurés permettaient des progrès physiques significatifs des joueurs. Mais aussi parce qu’il a fallu trouver les moyens pour rendre les joueurs plus aptes à répondre à la multiplication des matchs. Ces tendances vers une densité et une intensité accrues de la compétition footballistique ne vont pas s’atténuer.
Par ricochet, cela demande de préserver, voire d’étendre, les temps de récupération/régénération des joueurs, ce qui réduit leurs temps de préparation et/ou de formation déjà bien ténus. Pour pouvoir, malgré tout, marier l'ensemble et rendre les joueurs performants, il devient alors évident que tout entraînement physique footballistique doit être aujourd’hui le plus efficient possible.
Dans le champ d’action et d’intervention du PPF, cette efficience doit se comprendre comme une maximisation des effets d’un stimulus dans un minimum de temps. Cela implique de calibrer au plus juste les charges physiques en fonction des capacités d'adaptation aiguës ou chroniques des joueurs, selon le principe du « ni trop, ni trop peu ».
Pour obtenir cette maximisation, trois aspects d’efficience me semblent à discuter. Premièrement, l'efficience thématique : à quel moment et selon quel enchaînement faut-il faire réaliser aux joueurs ce qu'ils doivent faire ? Deuxièmement, l'efficience énergétique : comment développer et préserver l'énergie des joueurs avec le minimum de stimuli ? Troisièmement, l'efficience fonctionnelle : comment maximiser techniquement la gestuelle des joueurs, sachant que plus sa qualité est élevée, plus les exercices effectués auront un rendement énergétique élevé.
L’efficience thématique
Le respect de l’efficience thématique implique l’idée de chasser le superflu des contenus d’entraînement pour se concentrer sur l’essentiel. La complexité footballistique a pour conséquence que ses différentes thématiques d’entraînements physiques peuvent être contradictoires, limitant ainsi les adaptations positives cherchées par l’entraînement. Identifier ces limitations pour les exclure par un ordonnancement thématique est l’une des problématiques que le PPF doit résoudre pour rendre son entraînement physique footballistique plus efficient.
Cette efficience thématique est réalisée lorsque les moments, les situations et les exercices des entraînements sont agencés de manière à générer un cercle vertueux centrifuge de progression, c'est-à-dire qui augmente de plus en plus les capacités physiques des joueurs.
L'identification des thématiques d’entraînement et leur agencement dans le temps sont fortement influencés par l'option stratégique d’entraînement physique footballistique du PPF. Comme mentionné lors de la discussion sur l'efficacité de son entraînement physique footballistique, ce sont les différents outils de la planification qui vont aider le PPF à programmer, ou à organiser dans le temps, les thématiques physiques à entraîner. Ce qui est valable pour l’inter-entraînement l’est aussi pour l’infra-entraînement, dans le sens où chaque entraînement doit faire l'objet d'une réflexion thématique combinatoire [1] afin de pouvoir marier positivement, ici dans le sens d’un moindre coût, différents exercices d'entraînement.
L’efficience énergétique
Si les thématiques d’entraînement sont connues, encore faut-il savoir en calibrer les charges, selon la citation de l’alchimiste et médecin suisse Théophraste Bombast von Hohenheim, dit Paracelse, «Tout est poison et rien n’est sans poison ; la dose seule fait que quelque chose n’est pas poison». Dans cet esprit, l'efficience énergétique vise à obtenir le maximum d'effets avec le minimum de stimuli. Ce réglage au minimum pour obtenir le maximum suppose que le PPF connais les réels efforts générés par ses interventions.
Pour calibrer un exercice en termes de coûts énergétiques, le PPF doit prendre en considération le temps de récupération de chaque exercice. Il est bien connu que certains exercices sont plus traumatisants et demandent donc plus de temps de récupération que d'autres, comme c’est le cas des stimulations excentriques. Outre les effets très variables des exercices, la sensibilité individuelle des joueurs à la récupération est à prendre en compte. Les joueurs récupèrent très différemment des exercices selon leur état de forme, leur physiologie, leur morphologie, leur hygiène de vie, la météo, s’ils ont gagné ou perdu le dernier match, etc.
La problématique s’amplifie lorsque l’on sait qu’un exercice peut avoir des effets très différenciés sur chaque système du corps – musculaire, squelettique, fascia, nerveux – d’un même joueur. Le spectre de cette variabilité d’adaptation à l’effort augmente encore si l’on considère qu’un joueur n’est déjà plus la personne d'hier, qu’il est celle de ce moment présent, mais pas encore celle de demain.
Pour maitriser cette variabilité, je propose que le PPF entraîne selon une planification ondulatoire, afin que le volume et l’intensité des exercices correspondent à l’état de forme du moment du joueur [2]. Pour planifier ondulairement, le PPF peut faire appel au concept de charge interne et externe, qui a émergé au début des années 1990 à l’instigation, sauf erreur de ma part, de Georges Gacon [3]. Repris depuis lors par tous, ce concept permet de différencier les charges objectives subies par les joueurs (charges externes) des effets physiologiques individuellement ressentis et effectivement subis par les joueurs pendant l'exercice (charges internes). En tenant compte de cette charge interne, le PPF peut individualiser en ajustant au plus près des possibilités des joueurs, donc avec efficience énergétique, les charges d’entraînement.
L’efficience fonctionnelle
L'efficience fonctionnelle se réfère au niveau de la qualité d’exécution technique de mouvements, puisque plus cette qualité sera élevée, plus cela augmentera par fluidité et économie gestuelles le rendement énergétique des joueurs. Cela demande que le PPF comprenne la biomécanique, c’est-à-dire le design de la gestuelle footballistique ainsi que tous ses facteurs limitants à éliminer. Les résultats de ces analyses, que j’effectue par l'outil de la posturologie, doivent être mis en relation avec les profils des joueurs afin d’identifier ce qui est le mieux pour chacun d’eux pour pourvoir les corriger par école de la vitesse footballistique ou école d’appui.
Si on s’accorde sur le fait que le développement de la puissance musculaire par des séances spécifiques de musculation est profitable au footballeur, il est encore nécessaire de savoir, en termes d’exécution technique, selon quel mouvement, à quel degré d’angulation, avec quelle charge, à quel moment, selon quelle méthode. Par exemple, le squat est-il suffisamment fonctionnel pour que le joueur en tire des bénéfices pour performer dans le football ? Pas forcément, sachant que depuis tout jeunes, les footballeurs développent naturellement, par et dans le jeu, leur force en accélérant et en freinant par activation de leurs cuisses. En conséquence, si un joueur rencontre des problèmes de force dans ses membres inférieurs, c’est plutôt dans son impossibilité de l’exprimer. Pour remédier à cela, il s’agit de l’harmoniser corporellement par amélioration de son niveau de biotenségrité afin de le libérer de ses tensions de contraction. Dans cette logique, proposer des squats aux joueurs peut même être péjorant parce qu'ils sont susceptibles de renforcer leurs déséquilibres musculaires, ce qui génère des limitations fonctionnelles. Dans la même réflexion, je me permets de souligner, l’inutilité des développés-couchés parce qu’ils ne servent à rien dans le football sauf éventuellement à gagner quelques mètres lors des touches. Le choix des exercices à faire-faire selon leur plus haut degré de fonctionnalité est alors essentiel pour répondre aux exigences du critère de l'efficience demandé par un entraînement physique footballistique performant.
[1] Voir à ce propos un exemple avec la vidéo de Norbert Krantz et d’Anne-Laure Morigny sur la musculation combinatoire des Rendez-vous thématiques de la préparation physique de l’Insep https://www.youtube.com/watch?v=PQmErq-IiRw&list=PLQTYqUhZJhpWcEFGtXTReFWnnCNsonch4&index=14&t=1173s. Page consultée le 23.09.2023
[2] Ce constat pose le problème de la validé des tests de performances sportives notamment dans leurs conditions de reproductibilité. Si elles ne sont pas respectées, elles ne permettent pas de comparaisons diachroniques individuelles (le même sportif à des moments différents). Tenir constant tous les paramètres de réalisation de tests simplement exogènes aux sportifs (température, procédure d’échauffement, positionnement du matériel de test et moments des tests…) semble être l’enjeu majeur afin de pouvoir comparer les performances de sportifs comme l’attestent les pages introductives du Manuel de diagnostic de la performance, Collectif sous la férule de Swiss Olympics, janvier 2016.
[3] Georges Gacon, Signification et rôle de la fréquence cardiaque dans l’entraînement aérobie, CardiSport, Dijon, 1992.
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