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Les enjeux, les limites et les orientations méthodologiques de l’utilisation des résistances élastiques dans la préparation physique footballistique

  • Photo du rédacteur: xavierblanc
    xavierblanc
  • 29 nov.
  • 6 min de lecture
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L’utilisation des résistances élastiques se diffuse dans de nombreuses disciplines comme outil de développement fonctionnel de la montée de la puissance musculaire, ou l’explosivité, par modulation de la contrainte mécanique. Dans le football, où la prise d’espace par les accélérations, les réaccélérations et les changements de direction déterminent directement la performance footballistique, cette utilisation nécessite une compréhension fine de ses exigences posturales et neuromusculaires.


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Résumé audio de NotebookLM

Le football se situe majoritairement dans le registre de la « vitesse-force », c’est-à-dire dans la capacité à produire de la puissance musculaire par dominance de vitesse, donc sans « forcite ». mais aussi sans « précipitationnite ». Dans cette logique, toutes les méthodes et les modalités d’entraînement qui ralentissent l’exécution d’une gestuelle footballistique, à l’exemple d’une résistance élastique excessive, devient contre-productive. Elle dégrade les mécanismes sensitifs moteurs qui fondent l’accélération dont la fonction est de produire, à l’exemple d’un fouet, la vitesse de projection corporelle la plus élevée possible dans le temps le plus court possible.


Enjeux biomécaniques et neuromusculaires de la projection corporelle

La projection corporelle du joueur, consubstantielle de ses prises d’espace, repose sur l’orientation du centre de masse, l’optimisation de la force horizontale et la capacité à générer une montée de la puissance musculaire temporellement très courte. En effet, les actions footballistiques déterminantes, telles que les accélérations courtes, les départs arrêtés ou les changements de direction, s’appuient avant tout sur une montée rapide de la puissance musculaire, plus que sur la force maximale [1]. Ainsi, tout entraînement physique footballistique doit s’inscrire dans une logique où la vitesse d’exécution doit primer sur la force pour que le joueur se mette au diapason de la nature des intensités des matchs.


Lorsqu’une résistance élastique trop importante est appliquée, le geste ralentit, ce qui déplace l’effort vers une dominance de « force-vitesse » avec une modalité de force maximale en fin de mouvement, réduisant la pertinence neuromécanique de l’exercice. Plus précisément, l’idée est d’éviter que l’utilisation d’élastique renverse la logique mécanique d’une accélération soit du plus lent au plus vite, La logique du plus en plus lent par de plus en plus de résistance modifie l’organisation intersegmentaire, perturbe « la coordination de la vitesse footballistique » et dénature les schémas moteurs spécifiques en produisant l’inverse d’une accélération [2] .


Mécanismes, intérêts et limites footballistiques des résistances élastiques

Les élastiques présentent l’avantage d’offrir une résistance variable, progressive et orientable, permettant de cibler différentes chaînes musculaires et directions de mouvement. Toutefois, une tension croissante peut rapidement devenir excessive et réduire la vitesse d’exécution de manière non souhaitée. Dans le football, cette considération est particulièrement importante car les accélérations se jouent la plupart du temps lors des trois premiers appuis, où la maximisation harmonieuse de la force horizontale avec la vitesse du cycle de foulée sont déterminantes.


Les recherches de Morin et autres [3] ont démontré que des résistances trop fortes diminuent l’efficacité mécanique des accélérations, notamment par une réduction de l’extension de hanche, une modification de l’inclinaison du tronc et une altération du timing neuromusculaire. Cela entraîne un déficit de projection horizontale, pourtant essentielle dans les premières foulées pour faire la différence avec l’adversaire. Ainsi, l’utilisation d’élastiques doit être calibrée selon une logique d’une résistance qui diminue plus le taux d’accélération monte afin de préserver les caractéristiques mécaniques et neuromusculaires du geste footballistique.


Principes d’utilisation avec les exigences du football

Afin d’intégrer les élastiques dans une logique conforme aux exigences du football, quatre principes structurants complémentaires peuvent être retenus.


Le premier est celui de la spécificité mécanique, selon lequel les exercices doivent imiter les angles, les directions et les vitesses caractéristiques du jeu. Cela inclut les accélérations sur 0 à 20 mètres, les projections latérales, les démarrages après changement de direction et les impulsions diagonales.


Le second principe est celui de la vitesse d’exécution, selon lequel la résistance ne doit pas diminuer la vitesse de plus de 10 % par rapport à la vitesse footballistique maximale. Lorsque la vitesse reste supérieure à 90 % de la vitesse réelle, les adaptations neuromusculaires demeurent spécifiques, ici à comprendre comme fonctionnelles [4].


Le troisième est celui d’une dynamisation fonctionnelle, impliquant une progression cohérente, à savoir de la plus grande à la plus petite résistance. La recherche souligne l’importance de maintenir l’intention maximale de vitesse, même sous légère contrainte, pour stimuler un recrutement optimal des unités motrices rapides [5].


Le quatrième est celui du respect technique de la projection corporelle ample par extension. Une accélération digne de ce nom a pour fonction d’amener le joueur à prendre l’espace avant son adversaire. Cette extension corporelle vise à agrandir le rayon d’action des joueurs pour réduire celui de leurs adversaires. Cela se fait lorsque la résistance élastique respecte un alignement épaule, bassin et pied rectiligne permettant un pointage de genou performant.

Dans tous les cas, la résistance doit rester faible à modérée afin de préserver la mécanique naturelle du geste. Les exercices trop résistants, qui « plaquent et collent » le joueur en modifiant son inclinaison corporelle qui renforce une posture sagittalement concave, perdent leur intérêt fonctionnel footballistique.


Cela exclut les exercices avec élastiques qui réduisent progressivement la vitesse pour arriver à une vitesse nulle, comme les développé-couchers, ou encore les squats, même légers auxquels on rajoute des résistances élastiques. Certains pensent qu’il est pertinent de réduire la vitesse d’accélération par résistance maximale pour dans un second temps la libérer complètement par relâchement total de la résistance élastique. L’idée est de stimuler par contraste de charge, en supposant éventuellement « des transferts entre les types de force », le recrutement spatio-temporel des fibres musculaires. Outre le fait que ce type de transfert n’existe pas, pour ma part, la qualité première d’un tel exercice est qu’il oblige le joueur à s’équilibrer précipitamment pour ne pas tomber… donc qu’il améliore l’équilibration corporelle des joueurs. Pour le reste, j’avoue que je ne sais pas où cela nous mène en termes de développement qualitatif de la gestuelle footballistique.


En synthèse

L’analyse des usages des résistances élastiques dans la préparation physique du footballeur met en évidence un écueil majeur. Lorsque la résistance est trop élevée ou appliquée sans accompagnement du déplacement, elle entraîne un ralentissement continu du geste, qui dénature complètement la mécanique d’accélération, jusqu’à annihiler complètement la vitesse que l’on cherche pourtant à stimuler. Or, dans le football, la finalité d’une accélération n’est pas l’effort lui-même, mais la vitesse atteinte en sortie d’accélération, déterminante pour prendre l’espace avant, gagner un duel ou exploiter un espace libre.


Ralentir une accélération sous prétexte de renforcer l’effort revient ainsi à neutraliser l’objectif fonctionnel de l’accélération footballistique. Non seulement le joueur n’atteint pas de vitesse utile, mais il ancre, par « forcite » des schémas moteurs associés à une vitesse décroissante forcée par la force, en contradiction avec la logique neuromusculaire footballistique. À l’opposé, les charges légères de résistances permettent de maintenir une vitesse élevée, favorisent un schéma de foulée spécifique et conservent l’intention, respectivement l’accélération, explosive qui conditionne la qualité des prises d’espaces [4].


Ainsi, les dérives observées avec des résistances trop fortes telles qu’une perte de vitesse, une gestuelle dégradée, un cycle d’appuis allongés parce que trop poussés, une inclinaison corporelle artificielle qui renforce les dysfonctions posturales que le football génère, reflètent une incompréhension du rapport entre contrainte mécanique et spécificité du geste.


La priorité n’est pas d'ajouter de la résistance, mais de préserver une dynamique d’accélération complète où la vitesse augmente jusqu’à un niveau exploitable en situation réelle. Toutes les configurations d’exercice où l’élastique empêche le joueur d’atteindre cette vitesse utile doivent donc être écartées. Elles détournent l’entraînement physique footballistique de son objectif, qui est d’amplifier le joueur par son explosivité, et non d’étouffer dans l’œuf la libération de son énergie par résistance compressive.


À l’inverse et pour conclure sur une note optimiste, l’utilisation des élastiques pour entraîner les capacités de freinage peut s’avérer pertinente pour autant qu’elle respecte la gestuelle footballistique en la dénaturant pas, soit qu’elle reste un moyen d’entraînement et non une finalité sachant qu’à ce jour, et à ma connaissance, les compétitions de la meilleure utilisation des élastiques n’existent pas..


Bibliographie

[1] K. P. Clark, R. H. Rieger, R.F. Bruno, D.J. Stearne, The National Football League Combine 40-yd Dash: How Important is Maximum Speed? Journal of Strength and Conditioning Research, 33(6):1542-1550. 2019.

[2] G. Petrakos, J-B. Morin, B. Egan, Resisted sled sprint training to improve sprint performance: A systematic review. Sports Medicine, 46(3), 381–400. 2016.

[3] J.-B. Morin, J. Slawinski, S. Dorel, H. Saeidi, P. Samozino, M. Brughelli, Acceleration capability in elite sprinters: Mechanical insights. Medicine & Science in Sports & Exercise, 47(4), 1–10. 2015.

[4] M. R. Cross, M. Brughelli, P. Samozino, S. R. Brown, J-B. Morin, Optimal loading for maximizing power during resisted sprinting. International Journal of Sports Physiology and Performance, 2(8):1069-1077. 2017.

[5] J. J. González-Badillo, M. C. Marques, Relationship between strength parameters and squat jump performance in trained athletes, Motricidade, vol. 7, 4, p. 43-48. Universidade de Trás-os-Montes e Alto Douro Vila Real, Portugal 2011.

 

 

 

 

 
 
 

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