La « forcite » ; un des tue-l'amour de la vitesse footballistique
- xavierblanc

- 23 mars
- 14 min de lecture
Dernière mise à jour : 16 sept.

Même les plus sceptiques et récalcitrants reconnaissent aujourd’hui que la vitesse footballistique s’impose comme une des compétences physiques clés pour performer sur les terrains. Pourtant, son entraînement reste conceptuellement à défricher, pour mieux le comprendre et l’apprendre.

Dans cette absence, on tend encore trop souvent à la développer à travers l’endurance ou la force. Or, cela va à l’encontre d’une préparation physique footballistique pertinente, c’est-à-dire que chaque qualité physique doit être entraînée, selon le principe de spécificité de l'entraînement, par elle-même.
Le respect de ce principe est incontournable pour performer physiquement, mais il est à noter que l’entraînement footballistique de la qualité de force peut aussi être un moyen pour élever qualitativement un pic de vitesse. Bien manié, cet entraînement bonifie la qualité de vitesse footballistique en la dynamisant. Mal utilisé, il contribue à renforcer la « forcite footballistique». Une « maladie » qui, avec la « précipitationnite », altère la production de la vitesse footballistique.
Cet écrit vise justement à éclaircir en quoi consiste ce mal afin d’être en mesure de le prévenir ou d’en guérir. Pour ce faire, il commence par discuter de la force footballistique. Par-là l’idée est d’identifier les provenances de la « forcite afin de les éradiquer par l’éradication de leurs causes ». Ce cheminement aboutit à des propositions d’entraînement du physique footballistique qui préservent de toute « forcite » afin que les joueurs expriment tout leur talent footballistique par leur vitesse.
La force footballistique
Le football a véritablement pris conscience de l’importance de l’entraînement de la force physique dans les années 90. À cette époque, cet entraînement était principalement axé sur la prise de masse, suivant l’idée encore largement répandue aujourd’hui selon laquelle « de gros muscles signifient une grande force ». Par la suite, sous l’influence de chercheurs comme Carmelo Bosco et Gilles Cometti [1], une approche plus coordinative de la force a émergé, visant à mieux synchroniser les contractions musculaires, soit de mieux « les ordonner ensemble ». Cette évolution repose sur la compréhension que le développement de la force ne se limite pas à l’augmentation de la section des fibres musculaires, mais consiste à optimiser le recrutement spatio-temporel de ces dernières.
Cette optimisation repose sur deux stratégies possiblement complémentaires : les développements coordinatifs intra et intermusculaire.
· La coordination intramusculaire, qui améliore la synchronisation des fibres au sein d’un même muscle, nécessite des stimuli de force maximale selon une approche force-vitesse.
· La coordination intermusculaire, qui favorise une meilleure synergie entre les muscles, nécessite des stimuli de montée de la puissance musculaire (ou force explosive) selon une approche vitesse-force.
En fonction des exigences spécifiques d’un sport, ces deux formes de coordination peuvent se superposer, s’exclure ou s’additionner dans l’exécution des gestes. La question qui se pose alors est quels sont les véritables besoins en force du footballeur ?
Les besoins footballistiques de la force
Pour jouer le deuxième ballon et le conserver, on préconise souvent le développement de la force maximale par hypertrophie. Cependant, la plupart des joueurs ne parviennent pas à être réellement stimulés par les paramètres de la force maximale en raison d’une structure corporelle insuffisamment développée et d’un manque de maîtrise technique des mouvements fondamentaux de la musculation pour soulever les bonnes charges.
C’est ce qui justifie l’utilisation fréquente de machines. Celles-ci remplacent la structure corporelle du joueur en déterminant les mouvements, comme les squats et les développés couchés guidés ou la presse et en ciblant localement des groupes musculaires spécifiques. Si elles permettent de soulever des charges adaptées à la stimulation de la force maximale, elles contribuent aussi à accentuer ou à créer des déséquilibres musculaires. Plus encore, elles creusent l’écart entre la force développée et la capacité du corps à la canaliser, générant ainsi des tensions excessives qui s’expriment notamment par des pubalgies, des lombalgies et des discopathies qui à terme arthrosent les hanches pour le plus grand bonheur financier de toute la filière orthopédique.
Sans machines, la faiblesse des structures corporelles et le manque de maîtrise des bases techniques de la musculation empêchent donc les joueurs de supporter les charges requises pour un réel gain de force maximale. En conséquence, les faibles calibrages des exercices dits de force maximale ne sollicitent réellement que les capacités réactives des joueurs, et ce, pour autant que les exercices soient exécutés intensivement, sinon, j’avoue que je ne sais pas ce que ces entraînements entraînent.
Par ailleurs, bien que l'entraînement de la force maximale facilite la capacité à vaincre l’inertie corporelle, il ne garantit pas une amélioration du taux de montée de la puissance musculaire. Pourtant, nombreux sont ceux qui pensent qu’une dynamisation musculaire de la vitesse maximale en football passe par une spécification de la force maximale en force explosive. Or, sauf erreur de ma part, « cette approche transfert » ne repose sur aucune validation concluante.
De plus, le football disposant de très peu de temps pour entraîner l’ensemble de ses paramètres de performance, il est essentiel d’évaluer l’efficience des entraînements de force maximale, c’est-à-dire leur capacité à produire un maximum d’effets positifs avec un minimum de stimuli. Dans cette optique, l’entraînement de la force maximale semble plus coûteux qu’efficace. En effet, pour être réellement bénéfique, il nécessite des séances spécifiques, chronophages et énergivores. De plus, son efficacité repose sur un équilibre hormonal optimal, alors même que la fatigue accumulée par l’enchaînement des entraînements et des matchs compromet constamment cet équilibre, autrement dit « l’homéostasie hormonale » des joueurs.
Merci aux entraînements fonctionnels de nous mettre dans le bon chemin
Fort heureusement, le football sort progressivement des entraînements de force maximale en proposant des entraînements fonctionnels. Cela signifie qu’on entraîne la force par et dans les mouvements de la gestuelle footballistique. Toutefois, pour que ces entraînements soient efficaces, il est essentiel de comprendre les données techniques footballistiques sous-jacentes. Pour un exemple parlant, il suffit de se pencher sur la plupart des ouvrages spécialisés qui expliquent comment un joueur doit se déplacer rapidement en prenant exemple sur la technique de course des sprinters. Pourtant, si un joueur se déplace techniquement comme un sprinter, il ne peut simplement plus jouer à cause d’un équilibre corporel rendu complétement déficient et inadapté aux besoins d’exécution de la gestuelle footballistique.
D'un point de vue fonctionnel, le terrain de jeu nous enseigne avant tout que le football nécessite une gestuelle à 360 degrés et souvent en hauteur, afin de faire face aux situations imprévisibles du jeu. Cette gestuelle doit permettre aux joueurs de maîtriser rapidement le ballon et de se déplacer de manière appropriée, soit sans préférences motrices, pour répondre en toute latitude au déroulement du jeu. Pour y parvenir, mes recommandations sont de travailler, quel que soit le type d’entraînement, l’amplitude, la projection et la variation des mouvements footballistiques.
Des mouvements amples visent à corriger les projections avant-bas de la ceinture scapulaire des joueurs. Cette projection a pour effet de couper leurs foulées en les rendant corporellement concaves sagittalement. Pour corriger cela, je demande aux joueurs d’effectuer leurs mouvements en les finissant par la plus grande des amplitudes sur la base d’un alignement rectiligne des épaules, du bassin et des pieds. Ceci afin de les redresser posturalement en activant en force et en réactivité leur chaîne postérieure et en étirant leur chaîne antérieure. Ce redressement vise à ce que les genoux des joueurs puissent plus facilement pointer devant leur bassin, ce qui évite des cycles arrière de foulée qui les surfréquentent, donc potentiellement les « précipitationnent ». Ce redressement a l’avantage de rendre les joueurs plus disponibles pour scanner le jeu par le fait qu’ils n’ont plus besoin de se rééquilibrer par leurs capteurs visuels. Dans ce cadre, nombre des appréciations des arbitres peuvent s'expliquer par un déficit d'équilibre postural. Leurs capteurs visuels fixent le sol pour aider à se rééquilibrer alors qu'ils devraient se focaliser sur le jeu.
Cette amplitude corporelle permet aux joueurs de mieux dominer physiquement le jeu, car des joueurs plus grands, tant en termes de taille que de présence, élargissent spatialement leur rayon d'action, réduisant ainsi celui de leurs adversaires. Occuper les espaces de jeu de manière plus étendue est essentielle, mais le faire plus rapidement que l'adversaire est encore plus décisif. Pour cela, je propose que les amplitudes corporelles soient projetées avec qualité, afin de prendre les espaces de manière aussi brève que possible. L'amélioration de cette projection passe, d'une part, par la répétition qualitative et optimisée de courtes accélérations, ce qui permet d'affiner coordinativement leur taux de montée de vitesse en combinant au mieux la fréquence et l’amplitude des déplacements footballistiques cycliques. D'autre part, cela implique une dynamisation directe de la montée de la puissance musculaire, afin que celle-ci soutienne efficacement celle de la vitesse.
Le football étant un sport dans lequel chaque geste est unique, à l’exemple d’un penalty qui n'est jamais tiré de la même manière, les joueurs doivent être capables de varier leur gestuelle pour s'adapter aux situations que le jeu invite, demande ou impose. Mais varier pour varier n’a pas de sens dans le sens que ce principe d’entraînement est inopérant si les mouvements des joueurs sont entravés par les limitations articulo-musculaires et s’ils ne sont pas réalisés par le plus haut niveau coordinatif.
Dans la même idée de transformation de la force maximale en force explosive, il existe l'idée bien établie que pour atteindre des habiletés motrices de haut niveau, il faut d'abord développer la coordination générale à travers des activités polysportives, avant de la spécifier en une coordination fine par la spécialisation dans un sport. J’y vois ici toute l’influence et les reliquats de « la gymnastique pour tous » qui s’est diffusée pour des raisons sanitaires de la Suède à la Suisse à la fin du XIXème et au début du XXème siècles et dont l’institutionnalisation a donné l’important réseau associatif suisse polysportif FSG [2]. Toutefois, je ne suis pas convaincu qu’une coordination dite générale puisse réellement se spécifier en coordination fine. En revanche, ce dont je suis certain, c’est que le football est déjà un sport polysportif en soi. Ainsi, pour améliorer la qualité des habiletés footballistiques, il convient de cultiver ses plus hautes qualités de coordination fine par des variations gestuelles, dont l'agrégation permettra d'atteindre un très haut niveau de coordination générale.
La « forcite » footballistique ?
La « forcite » est une surutilisation de la qualité de la force pour produire de la vitesse footballistique. Autrement dit, le cas où les joueurs forcent leurs mouvements de vitesse pour essayer de se déplacer plus vite en « poussant » leur gestuelle. En cela, la force devient une finalité alors qu’elle est seulement un moyen pour performer. Poussé à son extrême, cette conception signifierait que pour potentialiser leur plus haute vitesse, les joueurs doivent devenir des haltérophiles. Mais si cela était vrai, cela signifierait que les footballeurs les plus vites seraient les champions d’haltérophilie. Dans ce cadre, si j’ai assimilé la « précipitationnite » à une voiture en surrégime (surfréquence), la « forcite » s’assimile elle à une voiture en sous-régime (suramplitude) que l’on force à accélérer, malgré un frein à main tiré.
Sur le terrain, la « forcite » se manifeste par des amplitudes excessives de mouvement, ce qui donnent des lourdeurs et/ou des « gaucheries » gestuelles qui bloquent l’expression énergétique des joueurs. Ils en péjorent même le potentiel, puisque par les poussées en force qu’elle demande, les suramplitudes coûtent énergétiquement. Pour en donner une illustration, c’est comme si vous rouliez à vélo avec un rapport de vitesse trop élevé, ce qui vous oblige « à vous arracher » en pesant de toutes vos forces sur les pédales en tirant sur vos bras et en vous arquant corporellement pour avancer, ce qui vous épuise très vite. La « forcite » provient et provoque donc des crispations corporelles qui s’observent par des mâchoires serrées, des épaules qui touchent les oreilles ou des poings serrés au préalable de tout mouvement ainsi que l’utilisation des bras pour « tirer » le corps vers l’espace désiré. Lorsque cette crispation devient systématique, elle peut entraîner ce que l’on appelle une «barrière de vitesse», un phénomène qui freine l’expression de la vitesse des joueurs.
J’identifie ici deux facteurs principaux qui expliquent cette « forcite ». Le premier est que, faute de stimulation spécifique de la vitesse footballistique et de leur étriquement, les joueurs ont tendance à résoudre la facilité de la Chose en utilisant leur force pour essayer de la produire mieux « ou de la faire sortir d’eux-mêmes ». Le second facteur réside dans des entraînements de la force footballistique qui renforcent, voire provoquent, cette « forcite ».
Une force naturelle empêchée
La première situation se caractérise par la sensation bien connue de « vide » dans les jambes. Souvent, ce vide est attribué à un manque de force dans les cuisses. Pourtant, le football, par sa nécessité constante d’accélérer, de freiner et d’adopter des appuis bas, développe naturellement une force brute considérable dans les cuisses. La véritable question qui en découle est donc : pourquoi cette force ne parvient-elle pas à dynamiser qualitativement l’expression de la vitesse footballistique ?
Selon une approche posturologique, cette force est « enfermée » dans et par le corps. Comme mentionné précédemment, le football projette la ceinture scapulaire des joueurs vers l’avant et vers le bas, ce qui raccourcit leurs foulées et génère des étriquements corporels concaves sagittalement. Par définition, cet étriquement se nourrit du raidissement des corps. Ce raidissement procure une sensation sécurisante de force et de réactivité, grâce à une tonicité accrue qui élève notamment le niveau de « slack musculaire », c’est-à-dire la pré-tension musculaire qui précède chaque mouvement. Cette sensation tonique incite, par cercle vicieux, à forcer encore plus les mouvements pour se sentir fort par sa force, ce qui raidit corporellement encore plus et donc étrique encore plus. Cet étriquement « rétrécit visuellement » les joueurs dans le sens que leur rayon d’action se réduit spatialement tout en augmentant le temps de ses prises d’espaces. Cela les rend plus vulnérables aux interceptions et à la récupération de ballon par l’adversaire, tout en réduisant leur impact physique sur le jeu.
En synthèse, les entraînements de force footballistique développent trop souvent des forces inutiles ainsi qu’inappropriées. Elles sont inutiles dans la mesure où un gain de force ne sert à rien s’il ne peut pas s’exprimer correctement, c’est-à-dire s’il ne dynamise pas le taux de montée de la vitesse des joueurs, voire s’il bloque davantage le mouvement en créant des tensions supplémentaires. Elles sont inappropriées, car elles ne favorisent pas les vitesses de déplacement et peuvent même les contrarier. En d’autres termes, le joueur mobilise automatiquement et inconsciemment en premier lieu sa force en lieu et place de sa vitesse pour se déplacer vite. Bref, il force sa qualité de vitesse, ce qui la brusque alors qu’elle a besoin d’harmonie et de fluidité pour s’exprimer pleinement, soit d’être délivrée sur le terrain en toute liberté.
L’entraînement de la force footballistique par la coordination intermusculaire
Selon ces réflexions, tout entraînement de la force en football doit impérativement respecter des critères de fonctionnalité propres à ce sport pour être réellement efficace. C'est pourquoi j'exclus de mon concept d'entraînement les entraînements axés sur la force maximale.
Premièrement, parce que pour la plupart des joueurs il n’est pas indispensable de développer une force maximale supplémentaire chez le joueur, mais plutôt d’optimiser et d’exploiter celle qu’ils possèdent déjà.
Deuxièmement, parce que ces entraînements tendent à rigidifier les joueurs en augmentant leur niveau de biotenségrité corporelle. Sans entraînements compensatoires de mobilité, cela limite structurellement l’amplitude des mouvements.
Troisièmement, les exercices des entraînements de force maximale ont un design de mouvement qui ralentit de plus en plus à l’exemple de la dernière répétition d’un squat que l’on pousse de toutes ses forces alors que la barre monte de plus en plus doucement vu la fatigue d’effort de plus en plus grande. Or, une projection adopte un design contraire, puisqu’elle demande une fin de mouvement la plus rapide possible, à l’exemple d’un fouet qui claque. Les projections de moins en moins rapides que les entraînements de force maximale instillent malheureusement une culture du mouvement qui force la production de la vitesse maximale en lieu et place de la rendre plus subtile, facile, flexible et fluide… bref, élégante.
Quatrièmement, en tant que sport ouvert, le football exige une totale liberté de mouvement sans restriction articulaire ou musculaire, c’est-à-dire sans l’existence de conflits lors de ses retours à l’équilibre et avec une coopération optimale entre tous les muscles pour produire de la fluidité. Cette coopération signifie que les muscles soient chacun les uns par rapport aux autres dans un rapport synergique positif, c’est-à-dire qui s’ordonnent harmonieusement ensemble. Pour garantir et développer cette harmonie, un entraînement de force doit alors être polyarticulaire. Autrement dit, il doit activer les muscles selon leur appartenance à des chaînes musculaires et non les uns indépendamment et après les autres. La modalité qui répond le mieux à ce besoin de synergisation est celle de la coordination intermusculaire.
Une autre manière d'améliorer la vitesse des joueurs sur le terrain est de développer leur élasticité musculaire grâce à un entraînement en régime pliométrique. Cependant, bien que de nombreux exercices soient qualifiés de « pliométriques », leur exécution footballistique ne sollicite pas toujours cette élasticité. Pour y parvenir, les stimuli doivent provoquer un étirement suffisant pour déclencher le réflexe myotatique, ce qui est rarement le cas. En conséquence, on travaille davantage les capacités réactives des joueurs que leur véritable élasticité musculaire.
C’est dommageable, car le football, avec ses nombreuses accélérations, repose principalement sur un régime de contraction musculaire concentrique. Ce type de contraction réduit l'élasticité des muscles par les étirements limités qu’il induit, ce qui augmente le risque de blessures, particulièrement des ischio-jambiers. Si un entraînement pliométrique n’est pas nécessairement utile pour élever le niveau de vitesse d’un joueur, il est, en revanche, très précieux footballistiquement pour ses vertus prophylactiques. Je le concrétise sur le terrain par des répétitions de 8 à 12 sauts avec barre de 30kg à 50kg et plus.
Enfin, pour rappel, si nécessaire, il arrive que des joueurs se supplémentent en apports protéiques pour prendre de la masse. Or, sans entraînements de force et même d’un programme de nutrition, cette supplémentation ne sert à rien dans le sens qu’elle ne remplace pas les entraînements de force, mais bonifie juste leurs effets.
En résumé, en entraînant la force à travers la coordination intermusculaire, j’améliore directement l’efficacité de la montée en puissance musculaire dans les gestes spécifiques du football. Cette approche prévient l’apparition de déséquilibres musculaires et contribue même à les corriger. De plus, elle optimise les coordinations fines à leur plus haut niveau, permettant ainsi une meilleure association de la vitesse avec la précision tout en assurant d’amples projections intenses dans les espaces de jeu.
La prévention et la correction de la « forcite » footballistique
En suivant les recommandations de Jacques Piasenta [3], qui stipule que pour se déplacer rapidement, il faut paradoxalement « contracter ses fibres musculaires dans une totale décontraction » , je préviens et élimine cette « forcite » en priorisant les entraînements de vitesse. J’utilise alors les entraînements de la force footballistique pour dynamiser, mais aussi pour corriger par harmonisation la posture des joueurs. Enfin, je garde toujours en tête que, avant de développer la force des joueurs, il est essentiel de faire émerger celle qui existe par extraction en adoptant une approche fonctionnelle et dynamique d’exécution des exercices.
1. Prioriser l’entraînement de la vitesse footballistique en tant que telle
À choisir entre des entraînements de vitesse et de force, les premiers doivent être priorisés en étant stimulés directement par des exercices qui reproduisent les exigences du football. Cela implique :
- des courts sprints répétés avec des changements de direction que je propose d’effectuer systématiquement lors des activations des entraînements ou en session Repeat Sprint Ability. Ces entraînements visent à cultiver les sensations de vitesse par le relâchement
- des activations réactives systématiques des 3 premiers appuis que les joueurs exercent lors des jeux de possession ou de conservation
- l'optimisation technique de la fluidité de ces séquences de vitesse par des écoles de vitesse footballistique qui intègrent des corrections posturales in vivo et in situ
2. Corriger la posture corporelle
Un corps rigide et verrouillé limite l’expression de la vitesse. J’entraîne sa libération par:
- des exercices de mobilité que j’intègre dans les activations et les séances d’entraînement. Je propose, en cas de besoins identifiés par un bilan postural, des séances spécifiques d’exercices d’étirement balistique par balancement rythmique doux et de Stretching Global Actif. Ce dernier me permet d’étirer excentriquement les muscles dit statiques dont la fonction est de nous tenir posturalement et qui sont souvent surtendus en isométrie
- la fixation des tensions corporelles au niveau du bassin. Ceci afin que les joueurs puissent canaliser leur puissance musculaire dans la gestuelle footballistique
3. Adopter une approche fonctionnelle de la force footballistique
Plutôt que de développer une force brute déconnectée du football, l’idée est de privilégier des méthodes qui l’entraînent directement dans la gestuelle footballistique et qui permettent de l’exprimer en :
- intégrant dans les exécutions des exercices les principes fonctionnels de la gestuelle footballistique qui sont pour ma part l’amplitude, la projection et la variation
- cherchant à ce que les chaînes musculaires collaborent mieux ensemble par des stimulations intermusculaires de force pour obtenir par cette harmonisation corporelle de la fluidité gestuelle
En conclusion
Pour éviter toute « forcite », l’entraînement de la force footballistique ne doit jamais être une finalité, mais un outil au service de la vitesse footballistique. En adoptant une approche plus spécifique, dynamique et fonctionnelle, les joueurs peuvent exploiter pleinement leur potentiel de vitesse sans tomber dans les pièges de la « forcite » qui produit de la suramplitude gestuelle. L’objectif est de libérer le mouvement en assurant une exécution gestuelle harmonieuse et efficace en combinant avec pertinence et sagacité la fréquence et l’amplitude. Cela implique d’éviter l’excès de travail en isolation musculaire sur machines et de privilégier les exercices polyarticulaires, de favoriser les mouvements qui améliorent coordinativement directement le taux de la montée de la puissance musculaire et enfin de limiter toute hypertrophie excessive qui alourdit et rigidifie les joueurs.
[1] Lire notamment Franck Taiana, Jean-Francis Gréhaigne et Gilles Cometti, Rapport de recherche, Football et musculation, Université de Bourgogne, Unité de formation et de recherche en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives
[2] Pierre Morath, Il y a un siècle... les débuts de l'athlétisme en Suisse, 1892-1924. Edition1996.
[3] Jacques Piasenta, L’éducation athlétique, Editions Insep, 1988.





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