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L’impact délétère d’une protraction scapulaire sur la performance footballistique

  • Photo du rédacteur: xavierblanc
    xavierblanc
  • 8 déc.
  • 8 min de lecture

Dernière mise à jour : il y a 7 jours

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La performance physique footballistique dépend notamment de la fonctionnalité des chaînes cinétiques, c’est-à-dire que l’énergie produisant la gestuelle footballistique soit transmise fluidement entre les segments corporels impliqués dans un mouvement. Une composante majeure de cette fluidité, souvent négligée parce qu’illisible, est la position de la scapula. En effet, une protraction scapulaire, soit une scapula « tirée vers l’avant », génère un enroulement interne des épaules. Cela renforce la projection antérieure footballistique de la ceinture scapulaire vers l’avant-bas, ce qui affecte directement la qualité de la libération de l’énergie mécanique et par voie de conséquence tous les niveaux de la vitesse footballistique. Mais, avant d’investiguer ce domaine, les questions de l’utilité de ce post, de son importance et de son opportunité doivent être discutées comme il sied à un entraînement physique footballistique qui (pré)tend à la pertinence pour être performatif.



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Ce post trouve son utilité dans le fait qu’il montre qu’un corps est un tout dont les parties s’ajustent et se compensent perpétuellement en fonction des tensions auxquelles le football le soumet. Comprendre ce fonctionnement tout à la fois global et local, donc « glocal », en essayant d’en identifier inductivement les origines et les différentes causalités vise à améliorer le choix et le type d’intervention du préparateur physique footballistique (PPF). D’une part, cette perspective « glocale » gomme une hiérarchie des problématiques corporelles qu’il peut rencontrer et doit résoudre pour que les joueurs performent mieux. D’autre part, cela annule les discussions portant sur le thème de savoir s’il faut entraîner les forces ou les faiblesses. L’enjeu ici est plutôt de découvrir les petites tensions ou celles qui se cachent et que l’on considère comme des détails alors qu’elles déterminent causalement la qualité de la production de l’ensemble de la gestuelle footballistique. À l’exemple d’une petite épine dans le pied qui stoppe un combat de MMA. Dans cette perspective « glocale », même les plus petites identifications causales des maux ouvrent utilement de grands champs d’analyse d’amélioration des capacités physiques des joueurs.


Le fait d’expliquer le global par le local, selon une approche « bottom up », revient à adopter le principe « small is beautiful ». La machinerie corporelle est tellement complexe et sophistiquée qu’il arrive souvent que lorsqu’un PPF prépare, il traite les symptômes par des emplâtres, qui soulagent temporairement, mais qui ne résolvent pas la survenance du mal. Cela se remarque par les joueurs poursuivis sans relâche par des fortes tensions musculaires qui les fatiguent et péjorent leur performance. Certes, il est humain de s’attaquer aux problèmes les plus visibles et lisibles, alors que parfois et même le plus souvent, le « diable se cache dans les détails ». Ces détails s’assimilent aux origines du mal qu’il s’agit d’éradiquer avant qu’elles ne dégénèrent en étriquement corporel qui génère des blessures et des baisses de performance. L’importance de tels dysfonctionnements ne s’évalue pas selon leur grandeur et/ou leur visibilité, mais par les ampleurs potentielles de leur capacité de blocages et de nuisances dans la production de la gestuelle footballistique.


Dans ce cadre, toutes les tensions, même les plus « innocentes ou supposées inoffensives », sont à considérer comme une opportunité informationnelle pour comprendre le fonctionnement corporel d’un joueur. Cette compréhension des tensions aide les PPFs à trier « le bon grain de l’ivraie » des exercices. Il s’agit ici de saisir qu’il n’y a pas de fonctionnement corporel parfait ou idéal-typique, ce qui exclut toutes les typologies qui font croire prédictivement qu’un joueur fonctionne comme cela ou ceci. Chaque production de la gestuelle footballistique est une signature corporelle individuelle déterminée biotenségrement par un arrangement personnel de tensions, de surtensions et de sous-tensions. Dans ce cadre, une libération d’une protraction scapulaire rend l’entraînement physique footballistique plus efficient pour autant que son traitement libère elle-même une énergie jusqu’alors inexpressive parce que comprimée et compressée.


La protraction scapulaire et l’altération de la plateforme scapulo-thoracique

La scapula agit comme une plateforme de rencontre des chaînes cinétiques, ce que Myers nomme une gare. Selon Kibler et McMullen [1] (2003), elle garantit la stabilité nécessaire à la transmission optimale des forces vers les membres supérieurs. Lorsqu’elle est projetée vers l’avant, cette plateforme perd son alignement, entraînant un travail compensatoire accru des muscles de la coiffe des rotateurs. Les conséquences sont une baisse de stabilité, une altération de la précision gestuelle et un risque accru de douleurs.

 

Cette protraction entraîne un raccourcissement des muscles antérieurs, notamment du petit pectoral, et un affaiblissement des muscles postérieurs tels que les rhomboïdes ou le trapèze inférieur. Cools et al. [2] (2007) ont démontré que ces déséquilibres perturbent la synchronisation scapulo-humérale, ce qui entraîne une perte de contrôle moteur et une augmentation du stress mécanique sur les structures periscapulaires.

 

L’efficacité du cycle étirement–raccourcissement (SSC), essentiel pour les actions rapides comme les accélérations ou les changements de direction, dépend de la capacité du système à se prétendre. Komi (2000) [3] rappelle que le SSC repose sur une tension élastique optimale. La protraction scapulaire réduit cette pré-tension, ou slack musculaire, en limitant l’ouverture thoracique, en abaissant le centre de masse et en perturbant le chemin de l’énergie cinétique du tronc vers les segments distaux. Le joueur perd en amplitude fluide donc en capacité de projection.

 

Il est à noter que le petit pectoral est souvent l’élément principal d’un verrouillage en protraction. Borstad et Ludewig (2006) [4]. montrent que sa longueur influence directement la capacité de la scapula à effectuer sa rotation externe et sa rétraction. Un petit pectoral raccourci tire en permanence la scapula vers l’avant, accentuant la protraction.

 

Une scapula verrouillée entraîne une diminution de la capacité de propulsion des membres inférieurs, une moins bonne équilibration, une perte de vitesse maximale et une moindre capacité de décélération. Les études de Seitz et al. (2011) [5] confirment également l’augmentation des risques de conflits sous-acromiaux et de tendinopathies liées à la protraction.

 

Le massage et l’étirement du petit pectoral

Le massage spécifique et l’étirement du petit pectoral sont centraux pour corriger une protraction scapulaire. Un massage profond, appliqué autour du processus coracoïde pendant 60 à 90 secondes, permet un relâchement immédiat du muscle, diminuant la traction antérieure sur la scapula. Une fois le petit pectoral détendu, les exercices de renforcement des rhomboïdes et des trapèzes inférieurs, les mobilisations thoraciques et les séquences de reprogrammation posturale motrice deviennent beaucoup plus efficaces. Il en est de même avec son étirement en fluage qui vise à ce qu’il lâche sa contraction par inhibition nerveuse et fatigue musculaire locale.

 

Détendre le petit pectoral et restaurer la mobilité scapulaire permet tout à la fois de libérer les chaînes cinétiques dans leur ensemble. C’est éviter le renforcement d’une posture concave sagittalement qui coupe les projections corporelles dans les espaces et enferme l’énergie mécanique du joueur. Cela participe ainsi à l’amplification corporelle consubstantielle à la production de la vitesse footballistique. Une scapula fonctionnelle permet une meilleure montée de la puissance musculaire, ou explosivité, des chemins de l’énergie cinétique fluides, soit de fait plus énergétiques.  

 

L’exclusion des exercices qui renforcent une protraction de la scapula

En fonction des informations précédentes, il s’agit non seulement de réparer des protractions de la scapula en éliminant les tensions existantes, mais aussi de prévenir leur apparition. Pour ce faire, il s’agit d’exclure les exercices qui renforcent par modalité musculaire concentrique la raideur des petits pectoraux pour les remplacer par des exercices en modalité musculaire excentrique, soit qui les renforcent en les étirant, ce qui les déraidit.

 

Les exercices à exclure

Ces exercices renforcent concentriquement le petit pectoral, ce qui favorise l’enroulement interne, augmente la traction antérieure de la scapula et rigidifie une posture sagittalement concave. Dans ce cadre, les exercices à proscrire sont :

 

- Les exercices de poussée horizontale en charge lourde qui renforcent fortement le petit pectoral et la chaîne antérieure que sont toutes les variantes du développé couché, les développé-couchés en prise de main serrée, les pompes classiques avec les mains rapprochées ou standard, les pompes déclinées et les pompes pliométriques.

 

- Les exercices de poussée verticale qui antériorisent les épaules, tels que le développé militaire effectué en haltères ou en barre selon une modalité concentrique lourde et l’Arnold Press soit tous les exercices qui amènent les épaules en position d’enroulement ou d’antépulsion.

 

- Les exercices avec charge devant le corps qui tirent la scapula en avant, soit les Front raises, (élévations antérieures), les Landmine press soit le développé avec barre pivotante, le Chest press machine.

 

Les exercices en suspension qui créent un « accrochement » en protraction tel que des tractions en suspension passive et en suspension trainer push-ups où la scapula glisse en avant soit tous les exercices où la scapula reste projetée vers l’avant, sans contrôle.

 

- Les exercices de gainage favorisant l’affaissement antérieur tels que la planche classique où les épaules s’enroulent, si le joueur n’a pas la stabilité scapulaire.

 

En résumé, il s’agit d’exclure tout exercice qui pousse devant soi, arrondit les épaules, recrute concentriquement les fibres musculaires du petit pectoral, met la scapula en abduction / antépulsion et rigidifie la posture sagittalement concave.

 

Les exercices à promouvoir

Ces exercices visent à restaurer la rétraction scapulaire, la rotation externe, la dépression scapulaire ou abaissement de la scapula vers le bas, le relâchement du petit pectoral, une plateforme scapulo-thoracique stable nécessaire à la performance footballistique. Tous ces exercices sont à réaliser selon une modalité musculaire excentrique.


- Les exercices excentriques pour rhomboïdes et trapèze inférieur tels que Row en excentrique en restituant la charge lentement en laissant les scapulas s’écarter, donc pas en protraction passive. Le Face pull excentrique dont la modalité concentrique est normale alors que l’excentrique dure de 4–6 s avec un accent sur la rotation externe et la rétraction scapulaire. Le Y-Raise excentrique sur banc incliné qui est très bon pour le trapèze inférieur si le retour en contrôle dure 4 secondes.

 

- Les exercices excentriques pour fixateurs de la scapula tels que le Scapula retraction on cable (tirage scapulaire pur) qui amène les omoplates en arrière pour autant que le relâchement se fasse lentement sans tomber en protraction. Le Reverse Fly excentrique avec poulie, haltères, élastique par un retour lent et le thorax ouvert.

 

- Les exercices d’ouverture thoracique et de contrôle moteur tels que les Wall slides excentriques face au mur avec un accent sur la dépression et rotation externe, le Serratus wall slide dans sa version postérieure qui est non protractive en maintenant les scapulas en légère rétraction, les Thoracic extension excentrique sur rouleau avec décompression antérieure de la cage thoracique.

 

- Le travail excentrique spécifique du petit pectoral qui s’effectue par des étirements excentriques par appui au mur avec des ouvertures lentes de 60s ainsi que des mobilisations costales avec des bras en abduction excentrique pour redonner de la rotation externe scapulaire.

 

- Pour sa part, le travail fonctionnel pour favoriser une stabilisation scapulo-thoracique peut se se faire par les Farmer carry rétractés sans laisser les épaules s’enrouler ainsi que le Row unilatéral excentrique en câble ou kettlebell.

 

En synthèse

La performance footballistique dépend des chemins fluides de l’énergie cinétique, que la protraction scapulaire perturbe en renforçant la projection des épaules vers l’avant-bas et en altérant l’ordonnancement segmentaire dynamique de l’énergie mécanique. Ce déséquilibre, souvent lié au raccourcissement du petit pectoral et à l’affaiblissement des muscles postérieurs, réduit l’amplitude, la vitesse et la précision gestuelle tout en augmentant les risques de blessures.

 

Détendre le petit pectoral par massage et étirement, puis renforcer excentriquement les fixateurs scapulaires, permet de restaurer la mobilité et la stabilité de la scapula. Dans cette logique, il est essentiel d’exclure les exercices qui renforcent la chaîne antérieure en protraction, au profit d’exercices excentriques qui rétablissent la rétraction et l’ouverture thoracique. Ceci dans le but d’optimiser la performativité de la production de la gestuelle footballistique.

 

Bibliographie

[1]. W.B. Kibler, J. McMullen, J. Scapular dyskinesis and its relation to shoulder pain. Journal of the American Academy of Orthopaedic Surgeons, 11(2), 142–151. 2003. S. Borloz, V. Graf, J-L Ziltener, Dyskénie de l’omoplate, REVMED.2012.8.367.2422

[2]. A.M., Cools, G.A., Declercq, D.C., Cambier, N.N., Mahieu, E.E. Witvrouw, Trapezius activity and intramuscular balance during isokinetic exercise in overhead athletes with impingement symptoms. Scandinavian Journal of Medicine & Science in Sports, 17(1), 25–33. 2007. 

[3]. P.V. Komi, Stretch-shortening cycle: a powerful model to study normal and fatigued muscle. Journal of Biomechanics, 33(10), 1197–1206. 2000.

[4]. J.D. Borstad,  P. M. Ludewig, The effect of long versus short pectoralis minor resting length on scapular kinematics in healthy individuals. Journal of Orthopaedic and Sports Physical Therapy 35(4):227-38, 2005

[5]. A. L., Seitz, P.W., McClure, S., Finucane, N.D., Boardman, L.A. Michener. Mechanisms of rotator cuff tendinopathy: intrinsic, extrinsic, or both? Clinical Biomechanics, 26(1), 1–12. 2011.

 

 

 
 
 

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