Repenser les thématiques de l’entretien physique footballistique d’intersaison pour préserver la compétitivité des joueurs !
- xavierblanc
- 10 août
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 6 jours

La rédaction du post, qui propose de faire-faire de la vitesse maximale footballistique dès le premier entraînement de reprise afin d’éviter des blessures, m’a incité à étendre la problématique à la gestion thématique des intersaisons. Cette période, dites « de repos », représente une phase charnière dans la gestion du physique des joueurs. Son enjeu est double. Elle doit permettre une régénération psycho-physique tout en maintenant un niveau de condition minimale pour éviter des reprises difficiles ou propices aux blessures.

La majorité des préparateurs physiques footballistiques (PPF) proposent aux joueurs des programmes d’entretien individuel centrés sur l’endurance aérobie et le « core training », considérés comme fondamentaux pour la stabilité posturale et la résistance à l’effort [1]. Cependant, cette approche fait l’objet d’un questionnement croissant. D’une part, parce que les données scientifiques montrent que ce ne sont pas ces qualités qui se détériorent le plus rapidement lors d’un arrêt temporaire d'entraînement et, d’autre part, parce que ce ne sont pas ces qualités qui font désormais la plupart des différences en match.
Cet écrit vise alors à savoir selon le critère de la pertinence de la performativité de l’entraînement physique footballistique qu’elles sont les qualités physiques qu’il s’agit d’entretenir en premier lieu et comment les faire-faire. Pour ce faire, il aborde dans une première partie les temps d’altération et de recouvrement des qualités physiques et les croise avec les qualités physiques qui sont habituellement entretenues pour ensuite, dans une seconde partie conclusive, formuler des exemples de planification thématique de l’entretien intersaison du physique footballistique.
Les temps de déclin des qualités physiques footballistiques
La souplesse, bien qu'elle ne soit pas toujours intégrée dans les batteries de tests de performance, décline rapidement en période d’inactivité, soit dès la première semaine d'inactivité. Elle joue un rôle essentiel dans la prévention des blessures musculo-tendineuses [2], particulièrement à la reprise lors duquel le risque lésionnel est accru.
Pour sa part, l'endurance aérobique se maintient à son niveau sur une période de 2 à 4 semaines sans entraînement. Selon Dupont et al. [3], une baisse de la VO2max de l’ordre de 4 à 8 % est observée après trois semaines de repos complet chez des footballeurs. Cette perte est généralement compensée rapidement à la reprise grâce à des charges progressives et bien dosées tout en sachant d’ailleurs qu’une VO2max peut varier d’un jour à l’autre de plus ou moins 3 %.
Les qualités de la montée de la puissance musculaire, ou explosivité, et de vitesse montrent, quant à elles, une sensibilité élevée à l’arrêt de l'entraînement. Koundourakis et al. [4] rapportent une diminution significative de la force maximale et de la puissance des membres inférieurs des joueurs dès deux semaines de repos. De même, les performances en vitesse maximale et en détente diminuent de façon notable après 2 à 3 semaines d’arrêt [5].
Les pratiques habituelles d’entretien physique footballistique
Les programmes d’intersaison proposés aux joueurs sont souvent construits selon une logique de maintien global, avec un accent mis sur le volume plutôt que sur la spécificité. Le « core training », bien que pertinent pour la prévention, est rarement suffisant pour préserver les capacités neuromusculaires spécifiques nécessaires pour performer physiquement aujourd’hui en match.
Or en s’appuyant sur les temps de déclins ci-dessus, il apparaît que l’accent mis sur l’endurance soit excessif, voire erroné. En effet, comme le souligne Collomp [6], les adaptations aérobiques bénéficient d’une mémoire physiologique favorable à la reprogrammation rapide. En revanche, les qualités comme la montée de la puissance musculaire nécessitent des sollicitations régulières et spécifiques pour être maintenues.
Propositions de réorientation des thématiques d’entretien
J’ordre mes propositions thématiques par leur degré de nécessité, mais aussi par leur capacité à déterminer positivement celles qui rendent les joueurs plus réactifs et plus dynamiques. Dans cette perspective, ce sont la souplesse et la mobilité qui s’imposent suivies de la vitesse maximale footballistique. Vient ensuite le maintien de la montée de la puissance musculaire qui précède celui des capacités aérobiques.
1. Souplesse et mobilité
Des routines quotidiennes ou tri-hebdomadaires de mobilité articulaire, d'étirements actifs et de travail myofascial par rouleaux ou balles devraient faire partie intégrante du programme d’entretien d’intersaison. Elles jouent un rôle clé dans la prévention des raideurs et blocages inhérents à la pratique du football.
2. La vitesse maximale footballistique
La vitesse constitue aujourd’hui une qualité déterminante dans le football. Elle ne se résume pas à la simple capacité à courir vite en ligne droite, mais englobe une diversité d’actions spécifiques telles que des démarrages intenses, des changements de direction, des freinages et des accélérations répétées dans des contextes variés. Ces efforts, souvent décisifs dans les moments clés d’un match, nécessitent une coordination neuromusculaire fine et une raideur musculotendineuse, ou une biotenségrité, optimale alors que ce sont deux éléments qui se détériorent rapidement en cas d’inactivité [7].
Pour cette raison, les contenus d’entretien des programmes d’intersaison doivent inclure une stimulation régulière de la vitesse maximale footballistique. Cela peut se traduire par des séances bi-hebdomadaires qui proposent, après un échauffement digne de ce nom, chacune
- une dizaine d’accélérations sur 10 à 20 mètres en toute décontraction, soit au minimum à 80% des capacités des joueurs
- une dizaine d’accélérations sur 10 à 20 mètres avec des départs variés… assis, couché, en mouvement
- une dizaine de changements de direction et des freinages à haute intensité.
3. Maintien de la montée de la puissance musculaire
Les programmes d’entretien d’intersaison devraient intégrer des exercices de musculation à charge modérée, soit en vitesse-force, en insistant sur le dynamisme d’exécution et des sauts pliométriques. Ces stimulations peuvent être réalisées avec un matériel limité, ce qui les rend compatibles avec une période de repos.
4. Entretien des capacités aérobiques
Selon mon expérience du terrain, je propose aux joueurs d’effectuer 2 à 3 footings hebdomadaires pour maintenir leurs capacités aérobiques selon la progressivité des efforts dans une séance suivante
- 15 à 20 minutes en Zone 1 soit à égale ou inférieure à 65% de la fréquence cardiaque
- 10mn en Zone 2 soit entre 65 et 75% de la fréquence cardiaque
- 5mn en Zone 3 soit entre 75 et 85% de la fréquence cardiaque
- 10mn en Zone 1 soit à égale ou inférieure à 65% de la fréquence cardiaque
En pratique, cela donne les exemples de programme d’entretien d’intersaison suivants :
Pour un joueur pro :
| Matin | Soir |
Lundi | Mobilité - Core Training | Vitesse - Puissance |
Mardi | Pause | Pause |
Mercredi | Aérobie | Mobilité - Core Training |
Jeudi | Pause | Pause |
Vendredi | Mobilité - Core Training | Vitesse - Puissance |
Samedi | Aérobie | Pause |
Dimanche | Pause | Pause |
Pour un joueur amateur élite :
| Matin | Soir |
Lundi | Aérobie- mobilité-Core Training | Vitesse - Puissance |
Mardi | Pause | Pause |
Mercredi | Pause | Vitesse - Puissance |
Jeudi | Pause | Pause |
Vendredi | Aérobie- mobilité-Core Training | Vitesse - Puissance |
Samedi | Pause | Pause |
Dimanche | Pause | Pause |
Pour un joueur amateur qui a plaisir à s’entretenir physiquement :
| Matin | Soir |
Lundi | Pause | Vitesse - Puissance |
Mardi | Pause | Pause |
Mercredi | Aérobie- mobilité-Core Training | Pause |
Jeudi | Pause | Pause |
Vendredi | Pause | Vitesse - Puissance |
Samedi | Aérobie- mobilité-Core Training | Pause |
Dimanche | Pause | Pause |
Conclusion
Les données issues de la littérature scientifique soulignent l’urgence d’un réajustement des pratiques d’entretien physique d'intersaison. L’endurance ne devrait plus constituer l’axe central de ces programmes, au profit du maintien des qualités neuromusculaires parce que plus rapidement altérables.
Selon cette argumentation, l’approche individualisée, basée sur les profils de performance du joueur, devrait guider les choix des composantes à entretenir prioritairement. Cette logique permet d’optimiser la conservation des qualités clés sans surcharger inutilement l’organisme durant une phase de récupération-régénération.
Ainsi, une planification fondée sur les besoins réels des footballeurs associée à l’altération de chaque qualité physique est nécessaire pour mieux préparer les joueurs à la reprise, c’est-à-dire qui remplit le critère de pertinence qui sied à tout entraînement physique footballistique performant.
[1] B., Grosgeorge, Préparation physique du footballeur moderne, Paris, Amphora, 2014.
[2] C., Gajardo, J., Tous-Fajardo, C. Bishop, Étirements, mobilité et performance. Revue EPS, 368, 28–33. 2015.
[3] G., Dupont, A., McCall, F., Prieur, G. P., Millet, et S., Berthoin, Faster oxygen uptake kinetics during recovery is related to better repeated sprinting ability. European Journal of Applied Physiology, 110(3), 627–634. 2010.
[4] N. E., Koundourakis, N. E., Androulakis, N., Malliaraki, A. N., Margioris, Muscular performance at the end of the competitive season in elite professional soccer players. Journal of Strength and Conditioning Research, 28(10), 2891–2898. 2014.
[5] A. J., Coutts, A. J., Murphy et B. J., Dascombe, Effect of direct supervision of a strength coach on measures of muscular strength and power in young rugby league players. Journal of Strength and Conditioning Research, 21(2), 357–361. 2007.
[6] K., Collomp, Physiologie du sport. Paris, De Boeck Supérieur, 2009.
[7] C., Balsalobre-Fernández, J., Santos-Concejero, G. V Grivas,"Effects of Strength Training on Running Economy in Highly Trained Runners: A Systematic Review With Meta-Analysis of Controlled Trials." Journal of Strength and Conditioning Research, 35(1), 229-241. 2021.
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